LE POULET "GASTON GERARD" et LA POULE AU POT D'HENRI IV AU MENU DES AMIS.
11.12.2024
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Par Patrick Mathie
Le clocher -toujours provisoire- de l'église Saint Christophe de Champlitte sonnait le quart avant midi alors que trente adhérents des Amis, chaudement vêtus, commençaient à prendre place tour à tour dans la salle à manger du restaurant La Bourgade pour participer au repas convivial de fin d'année. Une petite marche apéritive effectuée dans un froid humide, depuis le parking de la mairie, avait presque permis de se réchauffer...
On parle de Membrey jusqu'à Champlitte!
Maison ou vécut Alexandre Lasnet
Photographie du Médecin Inspecteur Général des Troupes Coloniales Alexandre Bernard Etienne Antoine LASNET.( 1870 – 1940 ). Originaire de Roche et Raucourt en Haute Saône, cité bien connue de Sylvain et Marie ! Il est en tenue de service bleu horizon modèle 1921. On peut noter les broderies particulières du Service de Santé sur velours rouge au col et sur les attentes d’épaulettes. Il était titulaire des décorations suivantes : Grand-Croix de la Légion d’Honneur, Croix de Guerre 14-18 avec 1 palme et 2 étoiles, Médaille Interalliée de la Victoire, Médaille Commémorative de la Grande Guerre, Médaille Coloniale avec agrafes “SENEGAL et SOUDAN” “MADAGASCAR” “A.O.F.” “CÔTE d’IVOIRE”, Distinguished Service Medal des Etats-Unis
"Il fut nommé Médecin Inspecteur en 1916, Médecin Inspecteur Général en 1918, puis Médecin Général Inspecteur en 1928. Il a exercé les commandements suivants : Directeur du service de Santé du 1er corps d’armée colonial, Chef supérieur du service de Santé de la 6ème armée, Inspecteur du service de Santé du groupe d’armées de réserve, Chef supérieur du service de Santé de l’armée française du Rhin, Président du Conseil Supérieur de Santé des Colonies, Membre du Comité consultatif de Santé, Directeur du service de Santé et inspecteur des services sanitaires en Afrique Occidentale Française, Président du Conseil Supérieur de Santé des Colonies et inspecteur général du service de Santé des Colonies, hors cadres et en mission spéciale pour le gouverneur général de l’Algérie. Il a été placé dans la section de réserve en 1932. Il était Grand-Croix de la Légion d’Honneur."
Que de célébrités sont originaires de Roche..!
Place de la fontaine...encombrée.
Le café du Balcon n'est plus et le coiffeur...non plus!
L'eau est dangereuse... à boire à Champlitte !
(certains ont essayé, ils ont eu des problèmes! cf Laspalès)
Nous touchons au but! Poussons la porte à gauche...
Au moment de l'apéritif, le Président lève son verre à la santé des présents et de l'ensemble des adhérents. La Trésorière est admirative!
NB: l'apéritif "Le Pommel" est fait à Ray sur Saône à base de jus de pommes et de miel.
Le menu. Merci à Nicole d'avoir assuré la liaison avec l'équipe de restaurant.
Une bonne salade au fromage de Langres
Un Pinot Noir bio de Chez Henriot et un blanc du même viticulteur local.
Le fameux poulet "Gaston Gérard" et son accompagnement
Avant le dessert, Jean Pierre Vienney nous fait part de ses recherches sur Henri IV. Henri IV?... Mais que diable vient-il faire dans cette galère? ...Il va nous le dire!
Il se trouve qu'Henri IV est venu dans la région quand il a voulu annexer à la France le comté de Bourgogne (entre autres) , tenu par les espagnols . Le 5 juin 1595 c'est la bataille de Fontaine Française.
La bataille de Fontaine Française
Henri IV, après ce qui fut une semi victoire (il n'avait pu annexer le comté de Bourgogne) aurait logé à Champlitte au Château Grillot sur la place des Halles.
La carte postale indique qu'Henri IV coucha la veille, d'autres indiquent que c'était le lendemain...
...toujours est-il que le roi Henri au comportement "peu amical" envers "la Comté" a servi d'enseigne à l'hôtel restaurant qui a précédé La Bourgade jusqu'en 2017.
Quand l'hôtel portait encore le nom d'Henri IV (2017?)
Avis de clients en 2017 pour cet hôtel 2 étoiles.
Un estaminet portant le nom du Roi béarnais a existé près du passage de la Leue... "VENTRE SAINT GRIS! JARNICOTON! ...ENCORE UN HENRI!
Mais "Fi des digressions" donnons enfin la parole à notre conseiller Jean Pierre:
Un orateur prolixe et des auditeurs "toute ouïe"!
...il nous dit:
Repas à la Bourgade
Permanence étonnante de la légende henricienne
Quand j’ai su qu’on viendrait à La Bourgade, j’ai pensé à l’ancien nom de l’établissement : Le Henri IV. Je me suis souvenu de l’excellent article de Paul Delsalle pour la revue “Images deFranche-Comté (décembre 2009)” :
1595 : Quand Henri IV ravageait la Franche-Comté…
Il se demande pourquoi la légende créée autour du roi au XIXème siècle avec sa poule au pot, son panache blanc, son image de père de famille jouant avec ses enfants, son ministre dévoué Sully s’est ancrée dans les esprits beaucoup mieux que les faits historiques souvent moins avouables.
Pour lui comme pour beaucoup, créer un hôtel à Champlitte avec pour nom “le Henri IV” c’est un peu comme si quelqu’un ouvrait à Kiev un restaurant qui s’appellerait : Le Poutine !
Les faits : Au début de 1595, Henri, roi de France depuis un peu plus de 5 ans, mais qui vient seulement d’être sacré roi (27 fév 1594) après son abjuration de la foi calviniste, se met en tête d’affermir son pouvoir (contesté par la Ligue) en provoquant une guerre de conquête.
Depuis Louis XI et la fin du duc de Bourgogne Charles le Téméraire, il se dit que “La Française doit être à moi” ce qui entend que tous les territoires francophones font naturellement partie de la France et que le roi a le devoir de les revendiquer.
C’est le cas de la Franche-Comté territoire des Habsbourg donc vassale du roi d’Espagne (également comte de Bourgogne).
Henri IV, viole tous les accords et traités protégeant la neutralité de la Franche-Comté et décide de procéder à son annexion par la force.
Il engage deux mercenaires lorrains, chacun à la tête d’une armée de soudards : le baron d’Haussonville et le sieur de Tremblecourt.
Ils ne sont pas d’excellents musiciens mais chacun à la milice Wagner qu’il peut !
En février 1595 les deux milices entrent en Franche-Comté par le nord. Jonvelle est saccagée puis Jussey, Vesoul et les troupes de reîtres se dirigent vers Besançon et Baume-les-Dames.
Inutile de dire qu’ils dévastent tout sur leur passage. Port-sur-Saône, Chariez, Luxeuil, Marnay, Quingey sont détruites entre février et juillet-août 1595.
Pendant ce temps, le “bon roi ”Henry prépare (avec le maréchal Charlesde Biron qui finira décapité en 1602) son entrée en Franche-Comté par le duché de Bourgogne à l’ouest. La bataille décisive a lieu à Fontaine-Française le 5 juin 1595 et il arrive devant Champlitte.
En bon soudard qu’il est, il rançonne la ville sous peine de destruction totale.
Il poursuit l’invasion en ne s’attaquant qu’aux villes et villages de seconde importance. Il évite les solides murailles de Gray et de Dole et attaque Arbois, Poligny et le sud du Jura. On dit que le siège d’Arbois fut effroyable !
Finalement, Henri se rend compte qu’il ne pourra pas conquérir la Franche-Comté. Il fait subitement volte-face et le “Vert galant” seretire la queue basse en se dirigeant sur Lyon à l’automne 1595 non sans avoir massacré, saccagé, tué, détruit châteaux, villes et villages comtois.
L’école de la troisième république s’était donnée pour mission de glorifier la construction du territoire français à travers les siècles. Elle passait volontiers sous silence les évènements défavorables ou contraires à cette thèse.
Les historiens ont souvent confondu les méfaits des guerriers qu’ils aient été commis par les troupes de la soldatesque amie ou ennemie des comtois.
C’était d’autant plus facile que le connétable de Castille et le chef des ligueurs Charles de Lorraine duc de Mayenne défenseurs de la Comté, n’étaient pas irréprochables.
Au 19ème siècle, tous les particularismes régionaux devaient être patiemment gommées.
C’est ainsi que “le bienaimé” roi Henri est devenu un héros national avec son ministre qui lui servait de couverture… Sully et ceci au même titre que Vercingétorix, Charlemagne, Saint Louis, Jeanne-d’Arc, Napoléon…etc !!
Jean-Pierre Vienney le 11 décembre 2024.
Cette rectification historique sur le véritable visage du "bon Roi Henri" méritait de s'insérer "ente la poire et le fromage" ( eh oui, rappelez vous du repas médiéval à Melin: au moyen âge on mangeait les fruits avant le fromage!).
Les techniques modernes au service de l'Histoire...
Chaudement applaudi, l'orateur put, à son tour, déguster son crumble d'automne!
A la sortie du restaurant, Jean Michel rencontre une de ses connaissances chanitoises qui nous parle de son village et de ses richesses patrimoniales.
Rue du Bourg
Rue du Bourg
J'ai interrogé Nicolas Vernot, le spécialiste médiéval bien connu, sur l'origine de cette niche incluse dans un mur de la rue du Bourg. Voici sa réponse:
"Il s'agit d'une triple niche antique ou plutôt d'inspiration antique, datable du 16e ou du 17e siècle. Les pilastres appartiennent à l'ordre toscan. La frise est ornée de deux bucranes* et deux rosettes en bas-relief. Il est possible qu'il s'agisse d'un remploi. Le fait que les niches soient vides ne permet guère d'en dire davantage".
*bucrâne= tête de boeuf.
Rue de l'Eglise
Rue de l'Eglise
Le château façade arrière
Rue de l'Eglise, maisons XVII° et XVIII°
C'était la dernière réunion de l'année des adhérents des Amis. Ce fut un moment convivial autour d'une bonne table, dans un cadre chargé d'histoire.
Rendez vous à l'Assemblée Générale du 11 janvier 2025
à Ray sur Saône!
Patrick Mathie 12 Décembre 2024
Photos Evelyne Joly et Patrick Mathie
Exposé de Jean Pierre Vienney
Contribution de Guy Coulon; lecteur du blog,ayant habité à Ray (il vit aujourd'hui en Bretagne) et qui a bien connu les villages du secteur dont Champlitte:
"Champlitte, pour nous jeunes habitants du pagus limitrophe, les vélos étaient de sortie avant les grandes vacances avec en tète le Pif, notre bien aimé maître d'école le jeudi, direction Champlitte : Chalindrey, le Pailly et son château, Violot et sa chapelle, Rivière le bois, Matz, Coublanc; là ou la Resaigne "se jette" dans le Saulon (salon ?) Montarlot et Champlitte et là pendant deux heures une leçon d'histoire en plein air dans les rues (ruelles ?) de Champlitte. Nous apprenions que ce que le Vert Galant avait raté au prix de nombreuses exactions, son fils Louis XIII avec l'aide de Richelieu et le prince de Condé encore détesté entre tous le réussit, ils durent s'y mettre à deux fois pour faire plier la Comté. A une époque ou l'on se demande de quoi sera fait demain, Champlitte et la région eut sa part de massacres, ne pas oublier les écorcheurs qui passèrent dans le coin laissant une trainée sanglante, comme quoi les milices ou les mercenaires ne sont pas d'invention moderne. Mais autre chose de plus plaisant, j'aime les vins de Champlitte ; le renouveau des vignobles, il y avait de vignes partout le long de notre promenade en vélo et comme le fromage de Langres tout cela manqua de disparaitre ! Hélas le succès de ce fromage n'a plus rien à voir avec le lait de la race du Bassigny " la Fémeline" totalement disparue après un petit renouveau et encore hélas le cahier des charges pour l'AOC de ce fromage autorise outre la Montbéliarde qui ressemble comme deux goutte d'eau à la fémeline: la "prim Holstein" -pisseuse de lait en chef -à 50% du cheptel. ce fromage que l'on ne trouvait il y a 50 ans que dans nos cantons et encore sur les marchés on le trouve partout au même titre que la cancoillotte en pot. Je ne sais pas si je vais encore avoir la force et la volonté de me rendre en Comté en 2025, le désir est là, une dernière visite à mes parents et à ma sœur partie très vite à 67 ans en janvier 2022 quatre mois après ma dernière visite et une visite au cimetière de la chapelle ou ils sont tous. J'ai pris un grand plaisir à prendre connaissance de votre escapade".