Association " Les Amis de nos Vieux Villages Haut Saonois". Recherche et communication sur le Patrimoine des villages de Haute Saône
Jacques Robert en 2019 devant l'ancien hôtel particulier Junot, 34 rue Baron Bouvier, Vesoul. Photo E.R.
Sur sa page facebook « Vesoul et alentours, maisons et hommes remarquables », Jacques Robert, ancien designer à la retraite, raconte les secrets d’histoire des bâtiments de la cité. Plus précisément, il piste les hommes et femmes célèbres passés par ou ayant habité Vesoul.
La décision de démolir l’hôtel Junot, édifié en partie au XVIIIe siècle au numéro 34 de la rue Baron-Bouvier, l’a fait bondir. « Je trouve cela dommage et un peu honteux que l’on démolisse ce bâtiment qui a une valeur historique et patrimoniale ».
Six têtes couronnées sont passées par là : deux tsars, deux princes russes, une impératrice française et un roi. « En janvier 1814, le tsar Alexandre Ier, empereur de Russie et roi de Pologne, accompagné de ses frères, trois princes russes, dont le futur tsar Nicolas Ier de Russie, y logent quelques jours. Ils sont alors à la poursuite de Napoléon, battu en Russie », détaille Jacques Robert, s’appuyant sur de nombreux ouvrages dénichés chez des bouquinistes.
Un peu plus tard, fin avril 1814, l’impératrice de France, Marie-Louise d’Autriche, épouse de Bonaparte, et leur fils, le roi de Rome Napoléon II font étape à l’hôtel. « Ils partent pour l’exil dans leur famille à la cour de Vienne. Avec son fils de 3 ans, Marie-Louise a décidé de ne pas suivre Napoléon exilé à l’île d’Elbe. La famille Bonaparte ne sera jamais plus réunie », détaille le passionné d’histoire.
Un autre homme célèbre y a séjourné : le frère aîné de Junot qui a fait bâtir l’hôtel. « Il était général d’Empire. Il est mort receveur général de la Haute-Saône », précise Jacques Robert.
Autant de petites histoires dans la grande Histoire qui lui font demander au maire « de surseoir à la décision inacceptable » de détruire le bâtiment.
Le permis de démolir ayant été déposé le 30 octobre 2018, il est compliqué de faire machine arrière. « Qu’on laisse au moins la belle grille ou un bout du bâtiment. Ou une plaque qui rappellerait tous ces gens-là », demande Jacques Robert.
Le bâtiment, qui n’est pas classé monument historique, abritait les services techniques de l’ancien hôpital Paul-Morel. Inoccupé depuis plusieurs années, l’Agglomération n’a trouvé personne pour le reprendre même à l’euro symbolique.
Le conseil départemental, qui cherchait un espace de 1200 m² , s’est montré intéressé pour y installer un centre médico-social qui réunirait ses deux centres actuels : celui du Montmarin et de la rue Serpente. « À deux conditions », explique le directeur général des services Emmanuel Faivre, « que nos 35 agents soient mieux installés et nos dizaines de milliers d’usagers mieux accueillis. Or la configuration actuelle de l’hôtel Junot, avec des demi-niveaux ne le permet pas et une réhabilitation est beaucoup trop chère. Deuxième condition : que l’on garde l’aspect extérieur côté rue et la grille du portail ». Ces dernières préconisations sont inscrites dans le permis de démolir délivré le 30 octobre 2018, en lien avec l’architecte des bâtiments de France. « Le futur bâtiment comprendra une construction similaire aux volumes actuels. La conservation des lignes des façades ainsi que le maintien de la clôture et l’utilisation de matières, de couleurs et de textures proches de celles existantes », peut-on lire.
Photo E.R.
Patrick Mathie Juin 2020